jeudi 13 janvier 2005

Comment faire un best seller

"Comment faire un best seller" Viridiana

Comment faire un best seller
C'est très simple: prenez quelques faits historiques réels ou acceptés, une abbaye mystérieuse où il se passe des choses bizarres, —il s'en passe dans tous les lieux religieux, ne serait-ce que les visites innombrables de gens à la recherche justement de ces choses bizarres—, des coïncidences de date sur tel ou tel personnage ayant existé, une prémonition attestée d'un écrivain sur une catastrophe, celle du Titanic par exemple, ou une autre, et là dessus brodez un scénario glamour où vous mélangerez habilement réel et imaginaire en lui donnant le ton du vrai et surtout du "scientifique" indiscutable. Même si par la suite vous démentez avoir fait autre chose qu'une oeuvre d'imagination: soyez sûrs que personne ne vous croiera et vous avez tout fait pour cela en effet. Ajoutez-y une bonne dose de mysticisme de pacotille et un zeste d'humanisme et/ou d'écologie de type science fiction, et surtout une bonne couche de violence, si possible sexuelle, et vous avez là les ingrédients des best sellers à la mode actuellement. Demeurez à l'écart et n'acceptez aucune remise en cause directe, car il faut que vous fassiez partie vous aussi du mystère sinon c'est raté. Ceci est navrant car tout le monde ou presque se laisse prendre à la manoeuvre qui a pour but de faire vendre des textes sans consistance. Les lieux cités deviennent eux aussi à la mode et ce n'est pas le petit maire d'un hameau perdu en Arriège, cible de l'auteur, qui va démentir les faits relatés dans le roman: il a même obtenu une subvention inespérée du conseil général pour retaper son village et surtout un pont d'or d'un producteur américain pour restaurer son église afin qu'on y tourne un film sur les "événements".



 Ce ne sont surtout pas les commerçants ou les habitants du lieu qui remettront en cause les "faits" historiques qui vont peut-être faire de leur canton un nouveau Lourdes. Une manne. Ce ne sont pas les libraires qui vont faire des ronds de jambes à tout va pour inviter l'auteur d'un autre best seller calqué sur le précédent comme un modèle fidèle, de moindre envergure tout de même, qui vont remettre en cause l'originalité de la "recherche"... Cela ne sera pas grave si ceci ne se faisait évidemment au détriment de littérateurs véritables rangés au placard pendant ce temps. C'est la littérature actuelle, toute calquée sur le modèle américain : mysticisme, suspense, ésotérisme, thriller, violence et fausses certitudes "scientifiques" censées mettre à mal l'église ou n'importe quelle institution vendeuse. Il y aura les "pour", les "contre", de faux débats qui vont faire crépiter les audimats, et surtout de l'argent à la clef pour relancer le commerce. La "littérature", c'est parfois cela.



lundi 10 janvier 2005

Zorro et zérosexualité

"Zorro et zérosexualité ou comment devenir un Don Juan" Hélène Larrivé

Comment devenir un don Juan

Hommes et femmes ne sont pas synchrones sur le plan du désir sexuel, c'est la source de la plupart des conflits dits de "couple", voire de drames, de séparations, de divorces, d'abandons etc... Un lieu commun veut que le désir des femmes soit moins puissant et surtout moins constant que celui des hommes. Il est en partie inexact. Autant que les hommes, les femmes éprouvent le désir et la passion amoureuse —même si le sujet fut longtemps tabou— ... mais leur "mise à feu" n'est, la plupart du temps, pas identique: leur "déclencheur" est presque toujours d'ordre romanesque, relié à la poésie, à l'instant, voire à un conditionnement intellectuel et idéologique, à une sorte d'aura dont l'amant a su s'entourer, c'est à dire à des archétypes essentiels qui peuvent certes varier selon les individues —mais le principe demeure.— Mis à part ces prémisses, leur désir existe, et tout aussi violent que celui des hommes. Chez ceux-ci en revanche, le désir semble davantage a priori, premier voire primitif. —Il faut évidemment pondérer en fonction des individus.—




Il semble souvent à l'état latent, voire pur, c'est à dire exister quelles que soient les circonstances, qui influent moins pour les mâles toujours prêts à s'exprimer —même sans résultat—. C'est ce malentendu qui génère ce que j'appelle la zoro et la zérosexualité. Les hommes qui ont compris d'instinct le phénomène —cela n'a rien à voir avec leur niveau intellectuel— et qui parviennent à s'adapter au féminin deviennent en général des Don Juan redoutables quels que soient leurs attraits physiques. Les autres génèrent ennui et monotonie voire une agressivité ouverte ou larvée, qu'ils ne comprennent pas. Un homme qui travaille avec ferveur ses dossiers dans le lit et qui, après avoir refermé les chemises, tente aussitôt des approches vis à vis d'une compagne qui a attendu puis s'est lassée et a fini par s'endormir en rêvant à un autre subira logiquement une rebuffade qui va l'ulcérer. Les qualificatifs funestes alors vont bon train: elle est frigide, elle ne l'aime plus etc... C'est faux: c'est elle qui a été humiliée et son refus ne venait que de la cécité ou la maladresse de l'homme. Ou alors, de guerre lasse, elle va céder, sans désir. Là, on trouve deux cas de figures: ou bien elle va plus ou moins jouer la comédie —comme dans la séquence désopilante du film "Quand Harry rencontre Sally"— et l'homme, de bonne ou de mauvaise foi, se satisfera de ses performances... ou elle demeurera indifférente, et là aussi il y a deux cas. Soit l'homme fera comme si de rien n'était et ils n'en parleront jamais —certains couples vivent toute leur existence dans ce non dit frustrant et hypocrite— soit il récriminera de plus belle: elle est frigide, elle ne l'aime plus etc... Il se peut, c'est même le cas général, qu'elle n'ose jamais s'expliquer ou que l'homme refuse de l'entendre.Les malentendus perdurent: de consultations en consultations, c'est encore la femme qui risque de faire les frais du décalage entre zoro et zérosexualité. Elle le sait et le sent: elle s'ulcère davantage. Cercle vicieux.Que faire ? Prendre modèle sur les animaux: chez ceux-ci, c'est en principe la femelle seule qui décide,  aucun étalon expérimenté ne tenterait par exemple de saillir une jument qui n'est pas prête, il sait qu'il risquerait l'éventration. Certes, il est peut-être frustrant pour le mâle d'être contraint à une attente qui peut être longue, mais ce que peuvent faire des chevaux,un homme d'intelligence moyenne ne devrait-il pas pouvoir le faire également ? Un essai désopilant... Et constructif.